Humblement, dans le silence de mon cœur, je me donne à toi mon Seigneur…

Qui n’a pas éprouvé cet élan de l’âme au cours de la veillée d’adoration dans la basilique de Vézelay ? Alors jaillit dans le cœur ce grand désir de se réconcilier avec son Créateur dans la confession.
Spectacle émouvant de tous ces routiers qui se recueillent debout, le long des nefs latérales, attendant patiemment leur tour, avec ce sentiment mêlé de fierté, emportés par ce désir du don de soi.

Plus bouleversante encore, l’expression de ces visages en clair-obscur : l’un à genoux pour déposer son fardeau trop lourd, l’autre qui s’abaisse pour mieux venir chercher la brebis du troupeau. Tous deux se rejoignent vers la lumière vacillante de Jésus et deviennent ainsi, l’espace d’un instant fugace, icône de la Miséricorde du Bon Dieu, donnée et reçue.
Goutte à goutte, l’élixir de la Miséricorde vient répandre sa bonne odeur de sainteté pour remplir toute la basilique. Et mille et une étoiles viennent scintiller devant le maître-autel, comme un hommage à Jésus Eucharistie qui déborde de grâce sur la foule des routiers adorant d’un seul cœur. La chaleur des flammèches fait s’élever les volutes d’encens sous les voûtes célestes de la basilique…

C’est la grâce de Vézelay ! Ce long cheminement de l’âme, que les kilomètres parcourus ensemble dans les brumes d’octobre a fait mûrir mystérieusement. : Le désir de l’âme se façonne au son des Ave qui s’égrènent le long des chemins creux, avec les premières heures routes dans les sous-bois humides qui sentent bon l’humus d’automne, mais aussi dans ces messes de tronçon qui réchauffent le cœur, dans les églises presque désaffectées, où l’on se serre sur des bancs inconfortables pour écouter Jésus qui nous appelle. Il en faut de la peine au Bon Dieu, pour vaincre la superbe de ce fier adulte en devenir : quatre jours à travailler son cœur, pour que jaillisse enfin l’étincelle de la demande de pardon…

Et pourtant…. Le retour est souvent bien difficile…

Assurément, on ne revient pas indemne de Vézelay ! Transporté par ces jours passés à ajuster son cœur au diapason du Bon Dieu, l’âme goûte une joie profonde à la mesure des exercices spirituels accomplis. Deo gratias pour cette consolation que nous offre le Bon Dieu pour nous confirmer dans notre foi et renforcer notre attachement au Christ….
Prier, porté par la ferveur de ses frères en route, quelle joie, mais prier seul… qui n’a jamais éprouvé au lendemain d’un temps fort une crise spirituelle, une prière qui s’affadit, moins régulière… les plus grands saints, à commencer par St Jean de la Croix n’ont-ils pas eux aussi affronté le désert ?

Nos pères routiers-pèlerins, une fois arrivés au terme de leur route ne revenaient pas chez eux l’espace d’un instant. Le terme du pèlerinage, n’était que la moitié du chemin, et le retour leur réservait à l’âme un temps de d’adaptation qui leur permettait de retrouver petit à petit le rythme de la vie ordinaire.

Il faut bien comprendre ici que l’amour du Bon Dieu ne peut se contenter d’une émotion spirituelle, l’adhésion de la volonté au-delà du sentiment, c’est ce qui donne la colonne vertébrale de l’amour. Vrai, donné, offert ! La crise spirituelle après un moment fort, est sans doute liée à une crise de la volonté. Ne cherchons nous pas à former le caractère ?

Alors voici quelques suggestions:

  • Tout, d’abord, ne pas s’alarmer outre mesure, ce syndrome pour désemparant qu’il soit n’en est pas moins fréquent! En parler d’urgence à son père spi… et si ce n’est déjà le cas, en choisir un, et un bon!! C’est le moment pour se fixer de petits objectifs… mieux vaut 15mn tous les jours que 30mn tous les 2 jours… petits pas… fidélité et prions Notre Dame de Lourdes de nous garder dans la fidélité à la prière…
  • Soyons convaincus que le Bon Dieu ne nous a pas abandonné, s’il arrêtait de nous garder dans son amour, ne fusse qu’un court instant, nous n’existerions plus de facto ! Le meilleur remède est de réciter son acte d’espérance
  • Au-delà du regret de ne plus éprouver la joie de la consolation, gardons en mémoire que cette épreuve est permise par le Bon Dieu lui-même, et voyons-y un appel à la persévérance pour renforcer encore notre foi. N’est-ce pas un signe pour nous abandonner encore plus complètement en nous recevant du Bon Dieu ?
  • « Si j’étais triste –disait le Saint Curé d’Ars-, alors j’irais me confesser tout de suite »(1). N’hésitons pas à re-demander de l’aide au Bon Dieu et utilisons le sacrement de réconciliation et les conseils de notre père spirituel pour progresser. Dieu nous parle par le regard de l’autre, et confions cette détresse pour trouver avec notre père spirituel le ressort nécessaire pour grandir. Gageons que la grâce reçue à Vézelay ne soit que le début d’une vie sacramentelle régulière
  • Les apôtres n’étaient-ils pas désemparés devant la prière ? Le Christ lui-même nous a légué le Notre Père et l’Eglise nous confie le trésor de la prière des pauvres : le chapelet. Alors si mon âme est seule, si je ne sais comment prier, les Ave récités montent tout droit au cœur de la Sainte Vierge qui nous conduira à son Fils !

Au soir de notre vie, nous serons jugés sur l’amour

Il est des lieux où la grâce du Bon Dieu se répand avec une abondance particulière, Vézelay est assurément l’un d’entre eux. Les larmes de Marie-Madeleine, la toute pardonnée, image de la tendresse du Bon Dieu, préfigurent le lavement des pieds où le Christ se met au service de ses disciples. A Vézelay, plus que les pieds, Jésus vient baigner l’âme de ses routiers pour les renouveler et les confirmer dans la foi. Le cœur des routiers bat à Vézelay de cette respiration profonde qui donne l’énergie nécessaire pour établir le règne du Christ dans toute notre vie, et dans le monde qui nous entoure. Sans les œuvre, notre foi est vaine, alors redécouvrons, à l’appel du Saint Père, les œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles. « Ce sera une façon de réveiller notre conscience souvent endormie face au drame de la pauvreté, et de pénétrer toujours davantage le cœur de l’Evangile, où les pauvres sont les destinataires privilégiés de la miséricorde divine » (2). Oui établir le règne du Christ c’est d’abord le servir dans les plus faibles ou « Sa chair devient de nouveau visible en tant que corps torturé, blessé, flagellé, affamé, égaré… pour être reconnu par nous, touché et assisté avec soin. » N’oublions pas les paroles de Saint Jean de la Croix : « Au soir de notre vie, nous serons jugés sur l’amour »(2)(3)

(1) Abbé Nodet, Le Curé d’Ars, sa pensée, son cœur, Éd. du Cerf 2006, p15
(2) Pape François, Misericordiae Vultus, Bulle d’indiction du jubilé extraordinaire de la Miséricorde. Donné à Rome, près de Saint Pierre, le 11 avril, veille du IIème Dimanche de Pâques ou de la Divine Miséricorde, de l’An du Seigneur 2015
(3) St Jean de la Croix, dichos 64

Par Bertrand HUMEAU, RS

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