Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

En ce temps-là,
Jésus se rendit dans son lieu d’origine,
et il enseignait les gens dans leur synagogue,
de telle manière qu’ils étaient frappés d’étonnement
et disaient :
« D’où lui viennent cette sagesse
et ces miracles ?
N’est-il pas le fils du charpentier ?
Sa mère ne s’appelle-t-elle pas Marie,
et ses frères : Jacques, Joseph, Simon et Jude ?
Et ses sœurs ne sont-elles pas toutes chez nous ?
Alors, d’où lui vient tout cela ? »
Et ils étaient profondément choqués à son sujet.
Jésus leur dit :
« Un prophète n’est méprisé que dans son pays
et dans sa propre maison. »
Et il ne fit pas beaucoup de miracles à cet endroit-là,
à cause de leur manque de foi.

Méditation

« Heureux ceux qui sont morts pour leur âtre et leur feu,
Et les pauvres honneurs des maisons paternelles,
Car elles sont l’image et le commencement,
Et le corps et l’essai de la maison de Dieu. »

Péguy nous invite a considérer notre propre maison comme la petite école qui conduit vers celle du Père.
Ainsi, le Christ se rend « dans son lieu d’origine » pour enseigner : normal, « charité bien ordonnée commence par soi-même ». Et pour notre Maître et Seigneur, les « maisons paternelles », au sens large, sont à évangéliser avant de conquérir le monde. Il s’agit donc de notre propre conversion par où il faut commencer. Or que se passe-t-il sous notre propre toit, c’est-à-dire en nous même, sommes-nous « profondément choqués » par Son enseignement ? Tant que le Christ est loin, que Sa Parole concerne les autres, Il ne nous dérange pas. Mais quand il se tourne vers nous, sommes-nous prêts à être bousculés dans nos consciences et nos habitudes ?
Quand est-ce que la Chrétienté -c’est-à-dire nous baptisés- « pays et propre maison » et « lieu d’origine » du Christ, « manque de foi » pour reconnaître Ses Signes et Sa Parole ? Notre ouverture de cœur de Routier est-elle suffisante pour que nos heures-route soient suffisamment le réceptacle de ce qui nous « frappe d’étonnement » ? « Sortir de sa maison et de soi-même, renoncer à son confort (intellectuel également) » n’est-il pas déjà le moyen de se mettre en chemin ? « Ne pas se contenter de la possession tranquille de vérités toutes faites » est la méthode du Routier pour faire de sa propre maison, c’est-à-dire de « son intérieur », un endroit où le Seigneur trouvera un cœur qui ne se choque pas d’une parole nouvelle.
Le Christ est le « fils du charpentier ». Évidemment si l’évangile du jour le mentionne, c’est dans un dessein précis. Charpentier, c’est l’incarnation du sens du concret par un travail éminemment manuel. Un axe d’effort du routier est de cultiver ce sens précisément. Le Christ n’est pas venu « sculpter de la fumée » par des concepts oiseux. Il est venu modeler concrètement l’argile de notre âme. Faut-il encore que celle-ci soit assez meuble pour se laisser travailler… Et la seule façon de ne pas laisser la matière originelle se dessécher est de prier sans cesse ! Car sinon le Christ est empêché de déverser ses grâces, ici désignées par les « miracles »… et Il n’a plus qu’à « secouer la poussière de ses souliers » car Sa délicatesse et la liberté qu’Il nous donne ne l’impose jamais.
« Fils du charpentier », le dédain est patent pour les « sachants » qui estiment que cet état humble est incompatible avec la « sagesse ». Oui, le Seigneur n’est pas celui que l’on voudrait qu’il soit… Il ne correspond pas à nos canons : le « prophète » n’est pas scribe. S’Il est le Verbe, Il est Verbe incarné, ce qui est toute la différence ! Ne laissons jamais nos prières être du verbiage. Incarnons dans le concret notre foi.

Le Christ est venu apporter le « choc et le feu ». Que nos propres maisons soient disposées a ce qu’Il en devienne le fondement. Alors, au Ciel notre patrie céleste sera enflammée d’amour.

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Le Seigneur vient évangéliser son lieu d’origine ? Que la prière continue du routier façonne notre propre cœur.